Association des Anciens du Grand Bleu de la Région
Ouest | |||||
INFO BRISCARDS | |||||
Directeur de la Publication : Bernard GROLLIER Rédacteur en Chef : Daniel MERGNY Secrétaire de Rédaction : Jean-Paul DEBACQ Comité de Relecture : André CORLAY - Alain LANCEAU Diffusion : Gérard MEREL |
Numéro 72 - 16 juin 2005 | ||||
Sommaire :
| |||||
|
Présent(e)s: Annick & André Corlay, André Coulon, Bertrand de La Fourniere, Raymond Dore, Jean-Claude Foucault, Michel Gaucher, Jean-Louis Gourdon, Alain Lanceau, Alain & Jeannine Marsollier, Thérèse & Gérard Merel, Daniel Mergny, Marie-Thérèse & Henri Sourdin, Michelle & Pierre Thomas,Excusé(e)s: Bernard Barbier, Robert Bareau, Yves Berthelot, Yves-Antoine Caillaud, Jean-Claude Dardalhon, Jean Paul Debacq, Renée Freuchet, Jacques Gaudry, Gérard Genais, Bernard Grollier, Anne Lannic, Daniel Lesage, Jean Marie, Philippe Pellaumail, Yves Petiteau, Bernard Rey, Joseph Simon, Allain Verhoeven, Absent(e)s: Claude Bardin, Roger Batard, Dominique Bertaux, Roger Billy, Marcel Bouancheau, Claude Chartier, Edith Chevalier, Yann de La Porte Du Theil, Alain Delepierre, Louis Drillet, Alain Ducottet, Yvette Echappe, Jean Claude Fasseu, Jean-Claude Fauvet, Gérard Fontaine, Jean-André Francois, Antoine Gapihan, Monique Guerin Langlois, Jean Landrein, Gérard Le Pommelet, Josette Lebosse, Gilbert Lemerle, François Michaud, Pierre Moreau, Jean Neveu, Raymond Ollivaud, Michel Paineau, Jean Pellerin, Romain Prudor, Michel Riault, Jean Paul Rocher, Pierre Rossi, Laurent Royaux, Monique Salmon, Etienne Schmit Participation: 13 et 5 conjoint(e)s Au déjeuner: 11
A l’approche de l’été, le bureau souhaite de bonnes vacances à tous et bon rétablissement à ceux qui ont des problèmes de santé.
La Brasserie du Bouffay à Carquefou Notre intervenant : M.Pierre LESOIN, directeur de la Brasserie du Bouffay à Carquefou. La bière traditionnelle Nous avons renoué, ici, avec la tradition. Celle de la bière traditionnelle. Notons que l’on fabrique des bières de façon traditionnelle, partout en France et dans les pays européens, même dans les grandes brasseries, jusqu’à la moitié du 20ème siècle. Par la suite, on verra s’opérer une divergence dans leur fabrication, entre le monde traditionnel et le monde industriel. Pour respecter cette tradition, nous utilisons ici de l’eau, de la levure, du houblon et de l’orge malté avec cependant, pour la fabrication de la bière blanche, du froment malté. En jouant sur la proportion de ces ingrédients, on arrive à restituer des parfums différents, des goûts différents et des couleurs différentes.
Nous évitons ainsi les pressions et nous restons maîtres de nos tarifs et de notre production. Il n’existe pas de grande tradition dans la brasserie bretonne comme il y en a dans le nord de la France, d’où je viens. On en trouve quelques excellentes marques, aujourd’hui, dans l’Ouest, où l’arrivée de la bière reste cependant assez récente (nous ne parlerons pas de cervoise celte dont la recette reste inconnue). La Bière dans l’Ouest. La pratique de la brasserie a démarré en Bretagne au début du 19ème siècle. Les prisonniers autrichiens et autres espagnols des guerres napoléoniennes, avaient été contraints de creuser le canal de Nantes à Brest. Certains, parmi les Autrichiens, ont trouvé sur ces terres étrangères une implantation idéale, s’y sont fixés et se sont mis à produire de la bière, métier qu’ils avaient pratiqué dans leur pays. L’arrivée des Alsaciens et Lorrains : une autre vague d’exilés, porteurs de la tradition de la brasserie, est arrivée en Bretagne, formée par les réfractaires à l’annexion de leur pays par l’Allemagne en 1870. D’autres sont allés s’installer en Algérie pour en produire également… Le développement a été très rapide: une brasserie s’est installée à Ancenis et à Nantes, où l’on en a compté jusqu’à douze par la suite. Petit à petit, elles ont fusionné pour donner « La Meuse » que les nantais ont bien connue. A son tour, elle a été rachetée en 1980. La Meuse disposait pourtant d’un équipement de pointe en Europe, mais la stratégie du groupe Danone, son « repreneur », était de la démanteler, comme tant d’autres… Une partie des équipements a été revendue en Chine, quelques pièces ont trouvé place ici. De « La Meuse » il ne reste plus qu’une grande jachère (près des abeilles si chères à Henri). Les brasseries bretonnes portaient souvent la marque de leur origine : Schindler, Fort-carré à Saint-Malo. Comment élaborer la Bière La bière est la
première boisson fermentée consommée par l’humanité. A l’origine, que l’on estime à 4.000 ans avant JC, on s’aperçut que quelques céréales broyées, arrosées d’eau, fermentaient et produisaient un breuvage enivrant. Nous fabriquons ici la
bière comme on le faisait jusqu’à la 2ème guerre mondiale.
A cette période marquée par la raréfaction de l’orge, le maïs, source
d’amidon beaucoup moins onéreuse que l’orge, s’est brusquement L’Orge Nous travaillons désormais essentiellement avec du malt, issu de l’orge en début de germination. L’orge a été touraillée, c'est à dire mise dans de l’eau tiède, dans une malterie, afin de gonfler, germer et faire apparaître la radicelle.
Dans certains pays d’Amérique latine on ne fait pas malter les céréales: après avoir broyé les grains et obtenu une farine, les brasseuses crachent dans la marmite, où la transformation d’amidon en sucre s’effectue grâce aux amylases contenues dans la salive ! Dans notre procédé, la
germination produite va développer ces mêmes enzymes bienfaisants qui vont
transformer l’amidon en sucre. Pour résumer, le boulot d’un brasseur c’est de faire le choix entre plusieurs critères : quel degré alcoolique (quantité de grains pour un même poids d’eau), quelle couleur et quel parfum sont recherchés ? C’est de la cuisine !
On obtient ainsi une infinie variété de bières car chaque type de grains apporte ses propres arômes et sa propre amertume. Une fois la recette mise au point, il faut s’y tenir, en tenant compte des différences dans la matière première dues aux variations naturelles des récoltes et aux fluctuations de la saison. Les Forçats de la Bière L’étape suivante consiste à produire une farine complète avec la balle des grains qui sera mise dans une énorme chaudière. Mélangée à de l’eau elle donnera une pâte: la « pâte à crêpes ». C’était autrefois le boulot de chien des brasseurs: le mélange se faisait à la main, en maniant des fourches jusqu’à élimination des grumeaux, dans des tonneaux lourdement remplis. Les Enzymes. Etape capitale de la
recette.
Vous découvrez que c’est un moment crucial pour la réalisation de chaque recette. C’est la caractéristique propre à chaque brasserie. La précision du réglage de la température influe fortement sur le produit fini. Parmi les procédés, le chauffage à haute vapeur est le plus précis. Vient ensuite le chauffage au gaz. Le moins précis et le plus coûteux, c’est le chauffage électrique en raison d’une plus grande inertie. L’eauLa qualité d’eau est, bien sûr, très importante. Elle doit être très peu nitrée car le nitrate empêche la fermentation (en Bretagne c’est un vrai souci). Aujourd’hui, on sait bien la maîtriser. On sait, par exemple, que la présence de sulfate de calcium conduit à la burtonisation qui donne des bières sèches. L’industriel sait ajouter ce sulfate si l’eau qu’il utilise n’en comporte pas assez. Il utilise des filtres au charbon pour éliminer le chlore ou des systèmes de détartrage si l’eau est trop dure. Pour un litre de bière produite il fallait compter 7 litres d’eau en raison des opérations de nettoyage des conteneurs. C’est moins vrai aujourd’hui avec l’abandon des bouteilles consignées. Mais de nombreuses brasseries alsaciennes ont quand même dû se déplacer, le manque d’eau apparaissant. Nous, nous utilisons l’eau de la communauté urbaine soumise à un traitement par l’ozone et éventuellement chlorée. Le Sucre d’Orge Au bout d’une heure et demi de chauffage, on obtient du sucre d’orge sous forme d’un sirop visqueux. Rappelons que la biscuiterie est grande utilisatrice du sucre d’orge: c’est lui qui donne aux biscuits nantais leur parfum et goût caractéristiques. Pour notre usage, le sirop a un défaut : il est plein d’écorces. Il faut le filtrer pour obtenir un jus clair. C’est une opération délicate et des générations de chercheurs et de thésards ont planché… et planchent encore sur de meilleurs systèmes de filtration. Cette opération dure 2h30 à 3h. On renvoie ensuite de l’eau chaude sur les écorces pour qu’il n’y ait plus de sucre résiduel. Quant aux écorces résiduelles, elles sont récupérées pour nourrir vaches et chevaux. A la finale, on obtient 10 hectos de jus clair que l’on renvoie dans la chaudière pour le faire bouillir pendant une heure et demie afin de le stériliser. C’est le moment où l’on va houblonner, pour lui donner l’amertume recherchée, qui ne se dissout dans l’eau qu’à haute température. A ce stade on dispose d’un jus sucré qui correspond au moût d’un viticulteur. Pour éliminer toutes particules de houblon, le jus sera centrifugé. Encore très chaud, on le fait passer dans un échangeur thermique à plaques qui refroidit brutalement le jus de 100° à 20°. L’eau chaude est récupérée pour le brassage suivant: c’est de la « cogénération ». Des levures antialcooliques. A la sortie de l’échangeur, le jus est envoyé dans des cuves thermostatées, où les levures destinées à la fermentation sont ajoutées.
Après quelques jours il n’y a plus de sucre et la levure baigne dans l’alcool, ce qui, étrangement, ne lui plaît pas. On abaisse alors la température. Les levures se résignent à un métabolisme de survie, mais c’est ainsi qu’elles se mettent à développer des arômes et des parfums de polyalcools, d’esters, d’aldéhydes, de glycérol, bref : tout ce qui nous intéresse pour qualifier la bière!. Cette période de maturation peut être prolongée très longtemps mais elle devient alors coûteuse par l’immobilisation d’importants matériels. On obtient dans ce cas des bières très parfumées (parfum de banane, d’abricot) mais qui ne sont appréciées que de quelques spécialistes. Les bières fabriquées ici ont une à deux semaines de garde. La température y est ensuite abaissée à 2°, température où les levures floculent, c'est-à-dire qu’elles s’agglomèrent et tombent au fond de la cuve où elles seront récupérées. Champagnisation Il ne reste plus qu’à tirer la bière sans même un système de filtration. Seul problème, elle est très peu pétillante. Ici on procède à une champagnisation. On comptabilise par microscope la quantité de levure encore en suspension (s’il n’y en a pas assez on en rajoute un peu) on rajoute également 4,5 grammes de sucre par litre de breuvage, on touille, puis on met en bouteille, on ferme et on met au chaud. Au bout de quelques jours, les levures sortent de leur léthargie, retrouvent du sucre à becqueter et se remettent au boulot, c'est-à-dire à produire du gaz carbonique et de l’alcool (très peu en pratique, car cela correspond à 0,2° d’alcool environ). A part le dégorgement bien connu des caves champenoises et que l’on n’effectue pas avec les canettes de bières (quel en serait le prix ?), le procédé est le même que pour le champagne. C’est une étape qui dure de deux à trois semaines. On peut ensuite étiqueter et vendre. La distribution sous forme de fûts augmente d’année en année car, une fois l’investissement fait, il n’y a plus besoin de verrier ni d’imprimeur. En revanche, comme on ne peut pas champagniser dans des fûts, on envoie directement du gaz carbonique. On obtient un produit qui a le même goût qu’en bouteille, ce qui signifie, (un comble !) que la champagnisation n’apporte rien à l’aromatique du produit ! L’hygiène générale que nous pratiquons fait que la bière ne s’altère pas dans les fûts en raison de la présence lactique: les fûts sont passés à la soude puis au désinfectant puis ils sont ensuite stérilisés à la vapeur.
La commercialisation Elle s’est faite naturellement auprès des grands magasins, car nous y avions nos entrées, du fait de notre premier métier. Nous sommes affiliés à une agence commerciale qui s’occupe de la grande distribution.
Mais l’essentiel de l’action commerciale s’est faite par le « bouche à oreille » et notre marché est à 70% départemental, 25% régional et 5% pour le national et l’international. En Europe 87% du marché est détenu par 3 groupes : Heineken, Kronenbourg (qui est passé aux mains des anglais) et Interbrew qui commercialise, entre autres, la Leffe, la Jupiter etc. Les grands groupes sont aujourd'hui soit Hollandais, soit Belge, soit maintenant Anglais. Les Allemands ont été écartés de ces grandes manœuvres à cause d’une loi sur la pureté de la bière qui leur était propre et qui leur interdisait de mettre autre chose que du malt dans leur bière. Il en est résulté la production de bières d’un coût supérieur (..comme par exemple les « blondes ariennes », ce qu’ajouta notre ami André Coulon, en connaisseur, sans doute..). Les perspectives La découverte d’autres moyens de produire la bière, nécessitant des moyens colossaux, a profité aux grosses structures, qui disposaient déjà des réseaux pour approvisionner le marché. Aussi, dans les années 80, il n’y avait pratiquement plus de petite brasserie en France. La situation s’est quelque peu retournée parce que les gens éprouvent plus, aujourd’hui, le souci de trouver des produits du terroir dont l’origine est connue et la « tête » du producteur visible. C’est valable tant pour la brasserie que pour le cidre ou la charcuterie. Notre entreprise reste située dans une niche. Elle peut espérer aller jusqu’à 5.000 hectos par an, mais c’est tout. Au-delà, elle sort de la niche et commence à titiller les gros. Nous devons aussi intégrer le fait que, même si elle est en augmentation constante sur notre marché, la consommation de la bière en France baisse de 3% à 4% par an… Aussi, notre ambition se doit d’être modeste. Une approche raisonnable et raisonnée.
La Loire-Atlantique compte aujourd'hui d'autres brasseries dont certaines sont présentes sur Internet :
. Brasserie
de la Soif - Nantes - 44
N'oubliez pas : l'abus d'alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
|
|
|